Sommet de l'OTAN à Marbella, Janvier 1991

Sommet de l’OTAN de Marbella.


................Le nouveau ministre de la Défense français effectue son premier déplacement officiel à Marbella aux côtés de François Mitterrand. Certes, ce n’est pas Ibiza, mais le cadre reste relativement agréable pour une rencontre de l’OTAN. Prenant ses marques parmi ses homologues occidentaux, Pierre Joxe a salué le soutien américain apporté au projet fédéral européen porté par François Mitterrand et ne peut qu'approuver la ligne de bon sens tenue par Dick Cheney au sujet du conditionnement du renforcement de l’aide militaire apportée à Berlin en échange d’un soutien allemand du projet de Paris. Une position qui fait doublement les affaires de la France, puisque si ce projet venait à être accepté, et que l’armée commune européenne était mise en place, alors Paris bénéficierait indirectement aussi de ce renforcement de l’aide militaire accordée à Berlin.

................S’agissant de l’Irak, François Mitterrand n’est pas tout à fait insensible aux chuchotements américains. Certes, son intention en déployant l’armée française au Moyen-Orient était essentiellement d’empêcher l’Irak d’envahir l’Arabie Saoudite voire les Emirats Arabes Unis, mais pas nécessairement d’aller plus loin. Néanmoins, deux facteurs sont bien compris par Paris. Premièrement, la participation de la France dans la coalition a fait perdre tout poids en Irak, et si l’intervention se limite à libérer le Koweït, Paris ne gagnerait guère davantage de marchés auprès de Bagdad, ce que seule une chute de Saddam permettrait. Secondement, la France reste perçue par ses partenaires comme OTANoesceptique, ce qui peut refroidir des chancelleries déjà tièdes au projet européen français. Suivre les Etats-Unis dans cette affaire, c’est prouver l’attachement de Paris à l’alliance atlantique et de son soutien à Washington, dont l’influence reste considérable sur le Vieux Continent.

................Nonobstant la situation en Europe de l’est, qui semble toutefois tendre à se détendre progressivement avec l’accession de plus en plus d’Etats à la souveraineté et l’organisation d’élections en RDA, François Mitterrand consent à l’augmentation des effectifs militaires suggérée par les diplomates américains. Le Général Michel Roquejeoffre, commandant des troupes françaises déployées dans le cadre de l’opération Daguet, verra ses moyens mis à sa disposition largement accrus puisque l'entièreté de la Force d’action rapide va désormais être mobilisée en Orient. Soit 47 000 hommes, 240 hélicoptères de combat et de manœuvre, 216 blindés légers (72 AMX-10RC, 72 ERC-90 et 72 AML-90), 200 tubes d'artillerie, 5 000 armes antichars, en plus du groupe aéronaval du Clemenceau déployé dans le golfe persique et renforcé par l’arrivée de nouveaux bâtiments de guerre libérés par la fin de l’opération Cèdre, et d’une centaine d’avions de combats Mirage F1 et 2000, ainsi que des bombardiers Mirage IV. Un appui logistique américain est toutefois grandement sollicité pour permettre l’acheminement rapide des renforts français.