[Roumanie-Bulgarie] Sommet de Vidin

......La victoire étincelante de l’armée populaire roumaine sur les putschistes réactionnaires bulgares est totale. Avec l’aide de la population et des autorités démocratiques bulgares, les trois purent surmonter le rapport de force. L’organisation d’une rencontre entre le Président roumain Iuliu Maniu et son homologue bulgare Stamboliyski était une suite logique après le succès de la coopération militaire entre les deux, pour restaurer la démocratie bulgare. La tenue de la rencontre est annoncée publiquement des deux côtés, mais seuls les cercles restreints des deux hommes participent. La ville de Vidin a été choisie, après le précédent sommet à Constanza, dans la forteresse de Baba Vida. Symbole médiéval, les présidents se réapproprient le lieu pour sceller la société paysanne nouvelle.

Le contexte régional depuis la fin de la « Grande Guerre » a changé du tout au tout : la Yougoslavie se forme exclusivement sur son assise serbe non seulement en détroquant sa conception fédérale initiale, mais aussi en évinçant le parti paysan de Croatie au pouvoir ; la Grèce a réalisée la Grande Idée et a annexé une bonne part de l’ancien territoire ottoman ; le parti agrarien polonais a été évincé du pouvoir après un coup d’Etat militaire et son dirigeant assassiné ; et enfin, la Tchécoslovaquie semble elle aussi connaître des tensions endogènes extraordinaires. L’Europe Centrale n’est qu’un terrain d’influence pour les grandes puissances qui imposent l’ordre par les armes (démantèlement de la Turquie ; interventions en Italie).

Tous ces événements coïncident vers un sens de l’histoire qui veut s’opposer à l’émergence de Républiques paysannes indépendantes et souveraines. Les échecs en Pologne et en Croatie sont des exemples concrets, qui actent la mort prématurée de l’Union paysanne internationale. Vidée de son sens d’abord par le positionnement centriste de la majorité des membres puis par l’autoritarisme des États étrangers. Une union fédérale entre les deux États paysans qui ont sut renverser la bourgeoisie par le sang, apparaît comme une solution du côté de Bucarest qui cherche une solution pragmatique sur la base d’une sécurité mutuelle (faute d’autres États paysans) et propose les contours d’une République populaire unie ; sous une forme fédérale constituée d’une République Populaire de Roumanie et d’une République Populaire de Bulgarie, ayant les frontières actuelles des deux États à l’exception du Dobrudja du Sud qui serait restitué aux Bulgares, vestige d’un temps révolu où les Rois étrangers se battaient au nom de prétentions impérialistes ; où les minorités seraient reconnues et protégées (langues, religions, cultures, etc) ; une direction exécutive collégiale avec six membres (trois de Roumanie et trois de Bulgarie, pouvant être membre de minorités) et enfin un parlement de six cents membres, une moitié pour chacun des deux républiques populaires. C’est une union pour enfin défendre les paysans, qui aura le double-bénéfice pour les Bulgares d’alléger ses problèmes économiques et de contourner les strictes conditions du traité de Neuilly.